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La tremblante des étoiles

Au début de 2003, une équipe internationale menée conjointement par le Dr Elizabeth Green (University of Arizona) et le professeur Gilles Fontaine (Université de Montréal) a annoncé la découverte d’une nouvelle catégorie d’étoiles vibrantes (Green, Fontaine et al. 2003, The Astrophysical Journal (Letters), 583, L31). Comme c’est souvent la norme en astronomie d’observation, cette trouvaille fut accidentelle dans le sens que les buts visés par l’équipe étaient, à l’origine, autres que la recherche d’instabilités vibratoires dans les étoiles observées. Cette découverte n’en est pas moins importante puisqu’elle a permis l’ajout d’un nouveau type à la famille grandissante des étoiles vibrantes. Ces dernières sont relativement peu nombreuses et représentent des phases évolutives bien distinctes de la vie stellaire. Durant ces phases, qui sont courtes à l’échelle stellaire (de quelques millions à quelques centaines de millions d’années), une étoile est soumise à des instabilités vibratoires qui se manifestent par des variations d’intensité lumineuse. Ces variations sont en général très faibles, mais elles deviennent observables à l’aide de détecteurs astronomiques modernes.

Les étoiles vibrantes sont intrinsèquement intéressantes parce que l’étude de leurs oscillations permet aux astrophysiciens de sonder leurs régions internes, régions inaccessibles à l’observation directe. Les techniques mathématiques utilisées s’apparentent d’ailleurs à celles employées par les géophysiciens pour étudier les ondes sismiques provoquées par des tremblements de terre ou des explosions souterraines. On donne ainsi le nom d’astéroséismologie à cette sous-discipline de l’astrophysique stellaire contemporaine. L’astéroséismologie permet, à distance, de déterminer la structure interne d’une étoile et de mesurer des paramètres fondamentaux comme sa masse, sa dimension et sa luminosité. Elle permet aussi parfois de déterminer, de façon indépendante, l’âge de l’étoile vibrante. L’astéroséismologie constitue donc un véritable banc d’essai pour la théorie de la structure et de l’évolution stellaire. Appliquée au Soleil (où elle prend le nom d’hélioséismologie), elle a permis de raffiner considérablement notre compréhension de ses mécanismes internes et d’élaborer un modèle solaire «standard» des plus réalistes.

Le nouveau type d’étoiles vibrantes, mis en évidence par les travaux du professeur Fontaine et de ses collaborateurs, a surpris les spécialistes, car personne ne s’attendait à la possibilité de vibrations avec des périodes caractéristiques de l’ordre de une heure (telles qu’observées) dans les étoiles sous-naines chaudes, des étoiles évoluées qui sont les géniteurs immédiats d’une fraction des étoiles naines blanches, les «cadavres stellaires» les plus nombreux dans la nature. Cette découverte inattendue a d’ailleurs été le point de mire d’une conférence internationale sur l’astéroséismologie stellaire tenue à Porto (Portugal) récemment. Il aura fallu presque un an d’efforts par l’équipe de théoriciens rassemblée par Gilles Fontaine pour comprendre l’existence même de ce nouveau type d’étoiles variables. C’est en mettant en commun les expertises de Pierre Brassard (Université de Montréal), Stéphane Charpinet (Observatoire Midi-Pyrénées), Pierre Chayer (Johns Hopkins University) et Malvina Billères (European Southern Observatory) — tous des anciens étudiants du professeur Fontaine — qu’on a réussi à percer l’énigme de l’existence de cette nouvelle catégorie d’étoiles vibrantes. La publication qui a résulté de ce travail a été très bien reçue par la communauté de spécialistes et elle vient tout juste de paraître dans le numéro du 1er novembre de The Astrophysical Journal (Fontaine et al. 2003, 597, 518).

Au-delà de la solution proposée pour expliquer l’existence propre de cette nouvelle catégorie d’étoiles vibrantes, l’application des techniques astéroséismologiques à ces dernières étoiles variables exigera beaucoup d’efforts dans le futur, à la fois sur le front des observations et sur celui de la modélisation numérique. Dans un premier temps, grâce à une subvention de la Fondation canadienne pour l’innovation obtenue dans le cadre de la Chaire de recherche du Canada de Gilles Fontaine, un contrat formel pour la construction d’un appareil spécialisé a été signé entre l’Université de Montréal et l’Université de l’Arizona. Cet appareil, baptisé LAPOUNE II et construit en Arizona, entrera bientôt en opération au télescope de 1,6 m du mont Bigelow près de Tucson. C’est avec cet appareil, particulièrement bien adapté pour l’étude des étoiles vibrantes, que Suzanna Randall obtiendra les données d’observations nécessaires à l’élaboration de son projet de doctorat au Département de physique de l’Université de Montréal. On prévoit une campagne d’observations systématique d’une des nouvelles étoiles vibrantes récemment découvertes et qui semble particulièrement prometteuse d’un point de vue astéroséismologique. Une campagne de quelque cinq semaines en continu est planifiée pour mars-avril 2004, et l’appui de plusieurs autres sites d’observations (Afrique du Sud, Australie, Espagne, Iles Canaries) est assuré. Des résultats intéressants sont à venir.

Pour de plus amples renseignements :

Professeur Gilles Fontaine
Téléphone : (514) 343-6680
Courriel : fontaine@astro.umontreal.ca