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Prendre la température des étoiles moribondes

Pierre Bergeron, Gilles Fontaine, François Wesemael et Pierre Brassard, physiciens au Département de physique de l’Université de Montréal, s’intéressent depuis des années à l’étude des étoiles naines blanches, ces moribonds stellaires qui représentent le sort ultime de plus de 97% des étoiles (incluant le Soleil) dans l’Univers. Ayant épuisé le carburant nucléaire en leur centre, ces étoiles terminent discrètement leur vie stellaire en se refroidissant sur des échelles de temps de plusieurs milliards d’années. C’est au moment précis où une naine blanche s’est refroidie à une température superficielle d’environ 12 000 K qu’elle devient instable et se met à «vibrer». Cette phase d’instabilité perdure jusqu’à ce que l’étoile se soit refroidie à 11 000 K environ, une question de quelque cent millions d’années. L’étude de ces vibrations, qui sont perçues par l’astronome comme des variations d’intensité lumineuse, permet de sonder les régions internes de ces objets, des régions qui sont inaccessibles à l’observation directe. Cette science, appelée astéroséismologie, s’apparente à la séismologie terrestre qui nous permet de sonder l’intérieur de la croûte terrestre lors de tremblements de terre.

Ces naines blanches variables sont connues sous le nom d’étoiles de type ZZ Ceti. Elles sont relativement peu nombreuses, en dépit d’intenses recherches par beaucoup d’équipes d’astronomes, à peine 36 ont été répertoriées depuis la découverte de la première il y a 40 ans. Le groupe de recherche de l’Université de Montréal défend depuis nombre d’années l’hypothèse selon laquelle toutes les étoiles naines blanches doivent inévitablement traverser cette phase très spéciale de leur évolution au cours de leur refroidissement. Si c’est le cas, nos connaissances de la structure interne des étoiles de type ZZ Ceti, obtenues par des études astéroséismologiques, pourraient alors s’appliquer directement à l’ensemble des étoiles naines blanches. Or, jusqu’à récemment, cette hypothèse n’avait pas encore été confirmée de manière formelle par les observations astronomiques. Ceci tient au fait qu’il est particulièrement difficile de déterminer la température superficielle de ces étoiles.

Au cours des dernières années, le professeur Bergeron a peaufiné une technique pour mesurer de façon très précise la température superficielle des étoiles naines blanches. Cette technique consiste à comparer de manière extrêmement détaillée les profils des raies d’absorption de l’atome d’hydrogène observés dans les spectres de ces étoiles avec ceux prédits selon des modèles théoriques développés à l’Université de Montréal. Les résultats les plus récents des travaux de Pierre Bergeron et de Gilles Fontaine dans le domaine, résultats qui ont été publiés dans le numéro de janvier 2004 de The Astrophysical Journal, ont démontré hors de tout doute que toutes les étoiles naines blanches variables de type ZZ Ceti sont, en fait, confinées dans un très faible intervalle de température appelé bande d’instabilité. De plus, toutes les étoiles dont la luminosité est constante se retrouvent à l’extérieur de cette bande d’instabilité. Ceci confirme l’hypothèse selon laquelle le phénomène ZZ Ceti correspond bel et bien à une phase évolutive «normale» de la vie des naines blanches, un résultat qui a pu être fermement établi à cause de la très grande précision avec laquelle les températures de surface des naines blanches peuvent maintenant être déterminées.

Avec cette approche, les professeurs Bergeron et Fontaine sont maintenant capables de prédire l’existence de nouvelles étoiles de type ZZ Ceti, simplement en prenant une mesure spectroscopique de leur température. Ainsi, au cours des dernières saisons d’observations, ils ont annoncé — et ceci avec un taux d’efficacité de 100% — l’existence de sept nouvelles étoiles ZZ Ceti. Et la «ruée vers l’or» ne fait que commencer. En effet, grâce à des subventions de la Fondation canadienne pour l’innovation, qui ont permis des ententes formelles avec l’Université de l’Arizona (où des télescopes performants sont disponibles sous des cieux de qualité), ces chercheurs ont pu entreprendre une étude systématique de toutes les étoiles naines blanches connues dans l’hémisphère nord dans le but de mesurer leurs températures superficielles et ainsi identifier de nouveaux candidats ZZ Ceti. Des observations spectroscopiques obtenues au télescope de 2,3 m du Steward Observatory en Arizona, suivies d’observations de photométrie rapide en Arizona et au télescope de 3,6 m de l’Observatoire Canada-France-Hawaii, les aideront à découvrir de nombreuses étoiles ZZ Ceti. Les études séismologiques subséquentes de ces étoiles vibrantes permettront aux chercheurs de connaître la structure interne et de mieux comprendre l’évolution de ces étoiles mourantes, et ainsi améliorer notre savoir de la vie et de la mort des étoiles dont elles sont issues.

Pour de plus amples renseignements :

Pierre Bergeron Téléphone : (514) 343-6678
Courriel : bergeron@astro.umontreal.ca